Kan ar Bed : le voyage enchanté
Liza, petite fille des monts d’Arrée, attend avec impatience le soir, lorsque son papa vient lui raconter des histoires qui la font voyager aux quatre coins de la planète : de la Russie à la Kabylie, des Guaranis en Afrique du Sud, du pays basque à la Chine… Kan ar Bed, le « chant du monde » qui vient d’être édité par les éditions Bannoù-heol est un formidable voyage à travers les cultures et les peuples qui, en luttant pour leurs identités, contribuent à donner de la saveur à notre onde actuel. La réalisation de ce livre-CD a pris de nombreuses années et n’a pas été sans aléas…« À l’origine, explique Arno Elegoed de Bannoù-heol, c’était un petit projet. On voulait faire un CD de comptines et de morceaux pour les enfants. En effet, s’il y a pas mal de choses en traditionnel, on a peu de nouveautés. »
Progressivement, l’idée d’un livre-CD émerge, tandis que l’ambition des deux coordinateurs, Arno Elegoed et Joris Inadïas, se développe. « Le risque, avec ce genre de projet, est de faire quelque chose de simplet. Au contraire, on s’est dit : pourquoi les enfants n’auraient pas droit à de la musique de qualité et qui s’adresse à tout le monde ? »
Quelques péripéties
Au final, les deux coordinateurs auront mobilisé une douzaine d’auteurs et impliqués près de 140 personnes ! Ils gardent un souvenir beaucoup plus mitigé de l’orchestre de Bretagne qu’ils contactent en septembre 2017. « On a perdu beaucoup de temps avec eux. Au début, ils étaient intéressés, puis on n’a plus eu de nouvelles. Ils n’ont même pas eu la correction de nous donner une réponse négative. » Faute de pouvoir faire appel à l’orchestre de Bretagne, pourtant financé par des fonds publics, Bannoù Heol a travaillé avec un orchestre à Sofia. « Une très belle rencontre, relève Arno Elegoed. Des gens très professionnels. »
Autre déconvenue avec TES, la maison d’édition en langue bretonne liée au rectorat. TES accepte de prendre en charge le projet en juin 2017, avant de se rétracter. « Parmi les titres enregistrés figure l’hymne sud-africain. C’est un hommage à Nelson Mandela. Mais au rectorat, on considère que des petits Bretons ne peuvent écouter qu’un seul hymne… La Marseillaise ! Ils étaient aussi gênés par la chanson corse qui parle de liberté. C’est incroyable de censurer ça… »
Succès d’édition
Nombre de personnes avaient pu découvrir Kan ar bed au salon du livre de Carhaix, cet automne, grâce à une très belle exposition sonore. Depuis, le livre-CD, bilingue (breton-français) est sorti. « On en a vendu entre 700 et 800 par correspondance sur un premier tirage de 1 300 », se félicite Arno Elegoed. Dans les écoles, l’ouvrage illustré par Geoffrey Berniolle, fait un tabac. « C’est vraiment sympa d’avoir pu mener ce projet, même si cela a été très prenant. On voit qu’avec la langue bretonne, on peut faire des choses ambitieuses. Cela démontre aussi notre ouverture sur le monde, contre les crispations de certains. »
Pratique :
Kan ar Bed, ur veaj war gan tro-dro d’ar bed, un voyage musical autour du monde, Bannoù-heol, livre-CD, 13 titres, 48 pages, 21,90 €.