Tintin, Titeuf, T’choupi… Déjà un quart de siècle de livres en breton pour cette maison d’édition quimpéroise
Nous sommes en 1999. Un jeune professeur de musique et de breton, qui enseigne à la fois à Quimper au collège Sainte-Thérèse et à Diwan, contacte les éditions Dargaud à Bruxelles pour obtenir le feu vert de l’édition d’un « Boule et Bill » en breton. À l’origine, le simple constat de l’enseignant sur le manque de livres pour les plus jeunes dans les établissements scolaires. Et chez Dargaud, pas de refus comme avec Dupuis un peu plus tôt. La chargée des droits valide sa proposition.
« J'ai un peu menti »
« Elle m’a dit oui, évidemment même, et m’a demandé l’adresse de ma maison d’édition, sourit Arnaud Elégoët, 52 ans. Bon, j’ai un peu menti, j’ai vite trouvé un nom et créé la structure dans la foulée ». Ce sera la maison d’édition associative Bannoù-heol, rayons de soleil en français. Le professeur travaillera pourtant quelque temps dans l’ombre, à la traduction, l’écriture et la mise en page, avant d’éditer, à ses frais, 1 000 exemplaires de « Sell 'ta » en mai 2000. Un succès, au point de devoir relancer une réimpression quelques mois plus tard.
« Je me souviens de mon premier salon du livre, à Carhaix, j’étais sur une toute petite table avec mon seul exemplaire, et de grosses maisons d’édition autour de moi », se remémore le nord-finistérien d’origine, qui a appris la langue dans un collège de Landerneau. Le goût du breton lui est venu tard. « J’entendais mes grands-parents le parler, mais pour moi c’était du plouc et du pas important. Jusqu’à ce que le conseil départemental offre aux élèves un livre de Tintin en breton. Cela a été un choc. Il était aussi bien qu’en Français. Finalement, elle était bien cette langue ».
20 000 exemplaires pour Petit Ours Brun
Sans l’accord de Dargaud, le Quimpérois n’aurait pas poussé dans l’édition. Il était loin d’imaginer que l’aventure perdurerait les 25 années suivantes. Après Boule et Bill est venu Titeuf ou encore Petit Ours Brun, près de 20 000 exemplaires.
En 2018, place à la première création, un livre-CD, « Kan ar Bed », composé de beaucoup de chants du monde enregistrés en Bulgarie et en Corse. Qui a fait un carton avec plus de 5 000 exemplaires écoulés. « La création, cela faisait très peur, mais l’idée était de sortir un peu des rééditions. C’est quatre ans de travail, de nombreuses nuits sans sommeil, et un sacré coût ».
Tous les albums de Tintin en projet
Pour le 25e anniversaire, l’éditeur n’a pas fait les choses à moitié avec l’édition d’une dizaine de livres, un record pour la petite maison quimpéroise. Et des titres bien connus comme T’Choupi et, surtout Tintin avec « Le crabe aux pinces d’or ». Ce Tintin qui lui a donné le goût du breton. « Il a été un tel marqueur, confesse Arnaud. Cela fait des années que j’essayais de l’avoir, et enfin Casterman a accepté. Les éditions précédentes sont épuisées. J’ai envie de rééditer tous ses albums ».
Le Quimpérois ne tient pas les comptes des livres édités. Peu importe, tant que les ventes permettent de poursuivre l’activité. « Je continue à proposer des choses qui plaisent, c’est l’essentiel. C’est souvent une histoire de coup de cœur, et toujours un pari quelque part ». Sa plus grande fierté ? « Que les livres soient utilisés dans les écoles, et aussi le retour de parents, des enseignants et des enfants qui les lisent avec plaisir. C’est ce qu’il y a de plus beau ».
Yves Madec