Thorgal vient rejoindre le club des héros bretonnants
Vous avez déjà traduit Boule et Bill, le travail a-t-il été différent ?
Je me retrouve plus dans les aventures de Thorgal que dans celles d’un petit garçon et de son chien. On passe donc d’un intérêt pédagogique (petites histoires marrantes d’une page) à un intérêt sentimental. Je pense mieux traduire car je suis dans l’histoire.
Avez-vous défini un niveau de langue pour un texte accessible aux plus jeunes ?
J’y ai fait plus attention pour Boule & Bill. Thorgal s’adresse plus à des adolescents et adultes. De toute façon, le niveau de langue dépend majoritairement du choix du scénariste-dialoguiste (Jean Van Hamme) plus que du traducteur, même s’il fait lui aussi des choix. Des relectures ont été faites par Ofis ar brezhoneg et quelques autres personnes reconnues pour leur compétence en breton populaire.
Quelles ont été les difficultés spécifiques à la traduction de Thorgal ?
Les œuvres en breton sont essentiellement des romans qui se déroulent à l’époque actuelle. Le monde fantastique et héroïque est peu développé, à part le monde des contes (Luzel par exemple) à comparer à celui des frères Grimm. Les difficultés majeures sont celles de n’importe quelle traduction. Retrouver l’essence en changeant la langue et être près à s’éloigner des apparences trompeuses de la traduction mot à mot.
Pourquoi avoir choisi Thorgal et particulièrement deux numéros qui ne se suivent pas chronologiquement ?
Thorgal est d’une part une série que je chéris depuis 20 ans pour ses qualités humaines, graphiques, féeriques et d’autre part, une série qui marche bien (en albums vendus) et qui ne devrait pas nous envoyer dans le mur. Plaisir et instinct de survie pour continuer, donc. Pour des raisons financières, nous nous greffons sur des rééditions dans d’autres langues (français, néerlandais...) à gros tirage, ce qui nous permet de réduire les coûts de 30 % par rapport à une édition réalisée seul. On peut ainsi vendre les albums à des prix équivalents à ceux des albums en français. Nous suivons donc la politique de réédition de l’éditeur Dargaud.
Deux premiers albums
Les deux premiers Thorgal en breton sortis par Bannoù-heol sont « An 3 den kozh a Vro Aran » (les 3 vieillards du pays d’Aran) et « Araknea ». « Depuis la parution du premier épisode « La magicienne trahie » dans le journal de Tintin, la réussite de la série Thorgal ne s’est jamais démentie, explique Tudual Audic. Thorgal, bien qu’élevé par les Vikings a des ascendances plus mystérieuses, puisqu’il appartient au peuple des étoiles et possède d’étranges pouvoirs. Les Vikings lui ont d’ailleurs donné le nom d’Aergisson, fils d’Aegir, dieu de la mer. La série intègre d’excellentes reconstitutions historiques, alternant continuellement avec le fantastique et la mythologie. C’est sans doute ce subtil dosage dans les aventures d’un héros plein de forces, mais aussi de faiblesses, allié à la qualité d’un graphisme en perpétuelle évolution, qui ont permis la pérennité de cette saga forte maintenant de 28 albums »
Recueilli par Ronan Larvor