Tintin parle à nouveau breton !
On l’appelle Tim en allemand, Kuifje en néerlandais, Täntän en bernois… Dès la fin des années 1940, Tintin va progressivement devenir un héros international.
Des albums sont traduits pour les Flamands, puis les Néerlandais. Dans la foulée, le phénomène Tintin envahit le monde, pour être traduit dans les 50 plus grandes langues.
Parallèlement, les premières traductions régionales voient aussi le jour. Soit des versions dans des parlers qui restent pratiqués dans une région, soit par les anciens, soit par les défenseurs des traditions locales voire d’une identité régionale.
Aujourd’hui, Tintin est ainsi disponible en 29 langues régionales. Les premières traductions de ce type furent le catalan et le basque en Espagne, le breton et l’occitan en France.
Traduit en breton depuis 1979
Les 7 boules de cristal, aventure emblématique de Tintin, est à ce titre une curiosité éditoriale : c’est le premier album du reporter traduit en breton, et le seul édité par Casterman, en 1979. Dans les vingt ans qui suivirent, tous les albums – sauf Tintin en Amérique, Tintin au Congo et Tintin chez les Picaros – furent traduits par Divi Kervella et publiés par la maison d’édition bretonne An Here. Mais depuis sa fermeture, en 2006, peu d’albums sont encore disponibles, ces traductions n’ayant pas bénéficié d’un énorme tirage.
Olivier Biguet est l’un des heureux possesseurs de ces albums « collectors ». « Je les ai tous », sourit ce quadragénaire, instituteur dans une école maternelle Diwan (bilingue breton français) à Nantes, où il est né.
À l’adolescence, il se découvre deux passions. Tintin, dont il lit toute la collection en français. Et la langue bretonne, qu’il défend avec fougue depuis. « J’ai appris le breton à l’université, et je parle cette langue toute la journée dans mon école, et le soir, en famille ». En plus de son métier d’enseignant, Olivier Biguet a traduit des romans en breton, dont Les dix petits nègres, d’Agatha Christie, ou Shining, de Stephen King.
5 000 exemplaires
Si l’on additionne toutes ces particularités, rien d’étonnant à ce qu’Olivier décide un jour à traduire en breton Tintin en Amérique, qui devient Tintin en Amerika. « Au départ, c’était juste pour moi et pour mes proches. Mais des amis m’ont dit que je devrais le faire publier. Alors, je l’ai fait relire et corriger et je l’ai présenté à Arno Elegoed, des éditions Bannoù-heol. » Intéressé par sa démarche, ce dernier contacte Casterman. Qui accepte d’éditer cet ouvrage à 5 000 exemplaires, avec le concours de l’office public de la langue bretonne du conseil régional.
« Au début de mon apprentissage, Tintin m’a aidé à lire en breton », se souvient Olivier Biguet. Juste retour des choses : il met aujourd’hui ses connaissances de la langue au service du reporter à la houppette.
L’enseignant a déjà commencé à traduire Tintin et les Picaros, avant même de savoir que cet album serait édité par Casterman, ce qui sera le cas. L’important, pour Olivier, est ailleurs : il contribue à son échelle au rayonnement de la langue bretonne.
Dévoilé lors du Festival du livre en Bretagne, à Carhaix, les 28 et 29 octobre, Tintin en Amerika (62 pages, 11,50 €) sera ensuite distribué dans les librairies classiques et dans les festivals et réseaux bretonnants par les éditions Bannoù-heol.
Laurent Beauvallet